Asset Management : Monthly Macro Insights — Août 2024

L'affaiblissement de la confiance des entreprises continue de semer le doute quant à la résilience de l'économie mondiale. Alors que l'inflation sous-jacente demeure supérieure aux cibles des banques centrales, la détérioration des marchés du travail a surpris les investisseurs, provoquant un changement majeur des anticipations de réductions des taux directeurs.

L’économie chinoise déçoit

Le PIB chinois n’a augmenté que de 0,7 % en glissement trimestriel au deuxième trimestre 2024, le rythme le plus faible depuis début 2022. De plus, les PMI faibles de juillet ont signalé un mauvais début pour le troisième trimestre. L'indice de confiance dans le secteur manufacturier a légèrement fléchi pour atteindre 49,41 et est ainsi resté en territoire de contraction pour le troisième mois consécutif. L’indice non-manufacturier a suivi la même tendance à 50,2, juste au-dessus du seuil de 50 grâce uniquement au secteur de la construction (51,2) soutenu par des mesures gouvernementales.

La mise en place d'un ensemble de politiques de soutien, y compris la réduction surprise de 20 points de base du taux de facilité de prêt à moyen terme d’un an par la Banque populaire de Chine, pourrait contribuer à stimuler l'activité économique et ainsi renverser la tendance actuelle. Cependant, l’efficacité dépendra en grande partie de la capacité des autorités à insuffler un nouvel élan, alors que la morosité actuelle pèse sur la demande domestique. Malgré un programme annoncé en grande pompe en mai dernier où le gouvernement central devait en partie se porter acquéreur des maisons invendues, le marasme du secteur immobilier se poursuit et continue de peser sur l'économie en raison notamment d'une faible capacité financière des gouvernements locaux et d'un appétit limité de la part des banques. En outre, les exportations qui ont été un moteur important de la croissance font face à d'importants vents contraires liés aux frictions commerciales et à l'imposition de tarifs douaniers de la part des États-Unis et de l’Union Européenne.

Changement rapide de la politique de la Fed…

L’économie américaine a fortement surpris à la hausse l’année dernière et a surpassé laplupart des autres économies avancées. Les mesures économiques généreuses du gouvernement, visibles à travers l’aggravation du déficit budgétaire, ont stimulé la demande intérieure. De plus, les effets négatifs du resserrement de la politique monétaire n’ont pas seulement été compensés par l'assouplissement de la politique budgétaire, mais les mécanismes de transmission ont probablement souffert de délais plus longs que
d’habitude.

Par exemple, dans le secteur du logement, les paiements hypothécaires pour les emprunteurs à taux variable ont certes augmenté parallèlement aux hausses du taux directeur, tandis que les emprunteurs à taux fixe font face à une augmentation importante mais retardée de leurs paiements hypothécaires. Par conséquent, la part élevée des prêts à taux fixe a ajouté un délai supplémentaire.

Cependant, les dernières données suggèrent que les effets des hausse de taux de la Fed sont de plus en plus visibles. Les taux de délinquance pour les cartes de crédit et les prêts automobiles ont atteint des sommets pluriannuels. Après une certaine amélioration dans le secteur du logement à la fin de l’année dernière et au début de 2024, les ventes de maisons ont chuté ces derniers mois pour atteindre un creux de près de 30 ans et les mises en chantier ont été particulièrement faibles. Plus important encore, le marché du travail semble s’être détérioré beaucoup plus rapidement que prévu.

Les États-Unis ont ajouté 114 000 emplois en juillet, contre 206 000 en juin et bien en deçà des attentes. Le taux de chômage a quant à lui augmenté à 4,3 %, déclenchant la règle de Sahm, c’est-à-dire que la moyenne mobile sur trois mois du taux de chômage a augmenté de 0,5 point de pourcentage ou plus par rapport à son plus bas des 12 mois précédents. Bien que cet indicateur ait correctement prédit toutes les récessions américaines d’après-guerre, l’augmentation de juillet a été en partie due à des licenciements temporaires. L’ouragan Berylet de même que les fermetures estivales des usines automobiles étant des facteurs importants, le nombre de chômeurs lié à des licenciements temporaires pourrait ainsi fléchir dans les prochains mois, car ces personnes anticipent d’être rappelées à leur emploi. De plus, une partie de la récente augmentation du chômage s’explique par un affaiblissement de la demande, mais elle a également été alimentée par une hausse de l’offre, comme en témoigne la croissance de la population active.

La trajectoire ascendante des derniers mois mérite toutefois une attention particulière, compte tenu de sa nature non linéaire. Une réduction de taux de 25 points de base lors de la réunion de la Fed en septembre est acquise, et d’un point de vue de gestion des risques, une réduction de 50 points de base ne peut être exclue. Le président de la Fed Jerome Powell ayant souligné lors de sa conférence de presse de juillet qu’il surveillera
attentivement les signes d'un affaiblissement trop prononcé du marché du travail, l’attention sera particulièrement portée sur ses remarques lors du symposium de Jackson Hole plus tard ce mois-ci, voire plus tôt.

… affectant probablement la BCE

L’inflation de la Zone euro a de nouveau surpris à la hausse en juillet, augmentant de manière inattendue à 2,6 % , tandis que la partie sous-jacente est restée à 2,9 % en raison de la persistance de l’inflation des services. Ce rapport est l’une des deux lectures cruciales de l’inflation qui informeront le Conseil des gouverneurs de la BCE avant la réunion du 12 septembre, sans oublier les données sur les salaires négociés du deuxième trimestre 2024 qui seront publiées plus tard ce mois-ci.

Bien que la dynamique des salaires et de l’inflation soit susceptible d’inquiéter les « faucons », la forte détérioration de la confiance des entreprises en juin et juillet, combinée à une grande incertitude concernant le cycle économique américain, pourraient convaincre la BCE de procéder à davantage de baisses de taux cette année. De plus, le taux de chômage a augmenté de manière inattendue de 0,1 point de pourcentage en juin, bien qu’il était à un niveau record de 6,4 %.

En somme, la chute des rendements des obligations souveraines mondiales est le reflet d'anticipations des investisseurs d'un assouplissement majeur et coordonné des banques centrales, dans un contexte de craintes croissantes que la croissance économique faiblit à un rythme plus rapide que prévu il y a quelques semaines à peine.

Achevé de rédiger le 5 août 2024.